Association  BPSGM          Les Basses Pyrénées dans la seconde guerre mondiale         64000 Pau

Un acte de résistance intellectuelle précoce. Article paru le 29 octobre 1940 dans le Patriote .

berriotUn article paru dans le Patriote  du 29 octobre 1940 constitue un exemple de résistance intellectuelle précoce.

 

 

 

 

Cet article est signé du démocrate-chrétien Raymond Berriot professeur de lettres à l’Ecole Normale de Lescar, « catholique fervent et militant en même temps que défenseur passionné de l’école laïque ».

 

Transcription de l’article original.

 

Loyalisme conditionnel.

Un homme né français et chrétien doit loyalisme à l’égard d’un gouvernement quel qu’il soit, mais il ne lui doit qu’un loyalisme conditionnel. Aucun gouvernement ne peut exiger plus, il n’en a pas le droit.

En tant que Français, un homme de ce pays doit être loyaliste dans la mesure où le gouvernement sert les intérêts profonds du pays : il ne le doit plus dans la mesure même où celui-ci les compromettrait.

Or, les intérêts nationaux sont à la fois temporels et spirituels : une nation est un corps et une âme. Tout gouvernement, quel qu’il soit, qui, au nom d’une seul de ses intérêts, temporel ou spirituel, négligerait l’autre ne peut prétendre au loyalisme de ses sujets. En particulier, un gouvernement qui, au nom du salut temporel du pays, trahirait son salut spirituel dégagerait du même coup les nationaux de tout loyalisme à son égard.

C’est en ce sens que Péguy s’écriait :

« Nos adversaires d’alors parlaient le langage de la raison d’Etat, du salut temporel du peuple et de la race. Et nous par un mouvement chrétien profond, par une poussée révolutionnaire et ensemble traditionnelle du christianisme nous n’allions pas à moins qu’à nous élever à la passion, au souci du salut éternel de ce peuple. Nous ne voulions pas que la France fût constituée en état de péché mortel. »

En tant que chrétien, un homme ne peut rendre à César que ce qui est dû à César : si le pouvoir établi exige ce qui lui est dû le chrétien le lui doit : mais s’il exige aussi ce qui est dû à Dieu, le chrétien ne peut que lui refuser obéissance. Et, en particulier, tout gouvernement qui ne se conformerait pas à son premier devoir lequel est de respecter par ses actes et dans ses écrits la personne humaine n’a plus droit à aucun loyalisme de la part d’un chrétien.

C’est en ce sens qu’Antigone s’écriait :

« Je ne croyais pas tes édits qui ne viennent que d’un mortel, assez forts pour enfreindre les lois sûres, les lois non écrites des Dieux : ce n’est pas d’aujourd’hui ni d’hier mais toujours quelles vivent et je ne devais, craignant la volonté d’un homme, y manquer ».

Ainsi donc, n’est dû à un pouvoir établi, loyalisme qu’autant que le pouvoir le mérite : le loyalisme rets toujours conditionné par les actes et les écrits du pouvoir et peut toujours lui être refusé lorsque celui-ci ne le mérite pas. Alors le contrat est rompu. Tout pouvoir qui exige plus abuse du pouvoir.

                                                                                                                                                                                                                 R. Berriot

Pour accéder à l’original du Patriote des Pyrénées du 29 octobre 1940cliquer ici. 

Référence bibliographique:

Saez Ricardo, Deux figures de la résistance démocrate-chrétien à Pau sous Vichy: le chanoine Jean Annat (1876 – 1970) et Raymond Berriot (1910 – 1988), in Revue de Pau et du Béarn n°42 – 2015, pages 209 à 234.

Cet article, comme le démontre Ricardo Saez dans la communication citée, a provoqué de nombreuses réactions à Pau et dans la rédaction du Patriote.

Il  a aussi provoqué des commentaires au niveau national comme ceux publiés dans la revue de presse de l’Action Française du 5 novembre 1940.

Transcription de l’article original.

Il faut savoir que Le Patriote des Pyrénées est inspiré par M. Champetier de Ribes, président du parti démocrate-chrétien, ancien ministre du Cabinet Daladier.

Tant que la Troisième République a vécu, M. Champetier de Ribes et ses amis de l’Aube n’ont jamais mis en avant cette doctrine du loyalisme conditionnel. Ils exigeaient, au contraire, « respect et amour » sans réserves à l’endroit des représentants du pouvoir.

 Au printemps dernier, l’Aube demandait que l’Action française fût « impitoyablement frappée » pour avoir critiqué… M. Pierre Cot. Ces messieurs ont attendu la chute du régime qui leur était cher pour fixer les devoirs des fidèles envers le gouvernement. Le loyalisme illimité de la veille céda soudain la place à un loyalisme conditionnel dont il n’avait jamais été question auparavant.

Il n’opposait pas Dieu à César quand César s’appelait le Front populaire. Le « refus d’obéissance » ils ne l’ont jamais signifié de 1936 à juin 1940. C’est aujourd’hui seulement qu’ils édictent des règles impérieuses et sévères…N’insistons pas. Tout le monde aura compris.

Pour accéder à l’original de l’Action Française du 5 novembre 1940 (page 2, 2ème colonne de la revue de presse): cliquer ici.

 

 

 

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