Association  BPSGM          Les Basses Pyrénées dans la seconde guerre mondiale         64000 Pau

Libération de Lescar. Incendie au quartier Saint Joseph.

Les-remparts

 

Les troupes allemandes d’occupation auraient, le même jour,quitté Lescar ainsi que Pau et les installations du champ d’aviation du Pont Long.

Elles cantonnaient à Lescar au quartier Saint Joseph dans des bâtiments appartenant à la paroisse de Lescar.

Avant de quitter les lieux, une partie de ces bâtiments a été volontairement incendiée. Louis Poullenot date cet événement du 26 août 1944. Un témoignage que nous avons recueilli parle du dimanche 22 août. Denis Labau retient la date du 20 août.

Le procès verbal de l’incendie dressé par les gendarmes en poste à Lescar est daté du 20 août 1944 qui s’avère être un dimanche.

Transcription du procès verbal dressé par les gendarmes de la brigade de Lescar, relatif à l’incendie des bâtiments paroissiaux, le 20 août 1944.

20 juin 1944                                          Brigade de Lescar

 

Incendie d’un immeuble appartenant à la paroisse de Lescar par des militaires des troupes d’occupation.

 

Aujourd’hui 20 aout 1944 nous Barrieu Louis, adjudant, Pose Albert et Corade Auguste, gendarmes à la résidence de Lescar, avons été avisés par exprès qu’un incendie détruisait un immeuble appartenant à la paroisse de Lescar et servant de salle de spectacle.

Nous nous sommes rendus immédiatement sur les lieux.

Le quartier St Joseph où l’incendie s’est déclaré se trouve au sud de la ville de Lescar. Il comprend un bâtiment à usage d’école, un bâtiment à usage de salle de spectacles. Les bâtiments sont entourés d’un parc et voisins d’une maison appartenant à Mr. Legrand qui est momentanément inhabitée.

Nous constatons ce qui suit : Le bâtiment en question est construit dans le coin de l’école, les murs en maçonnerie sont entièrement détruits par le feu. La toiture s’est effondré, il ne reste que les murs. Cet immeuble mesurait 28m50 de longueur, 9m50 de largeur, 4m de hauteur. A 60m de ce bâtiment brûle un énorme tas de bois, dont les flammes ont atteint un volet de la maison de Mr Legrand située à 50m de ce foyer. Le feu à cet immeuble est aussitôt circonscrit. Des mesures de précaution sont également prises pour protéger de l’incendie la villa « La Roseraie » située à proximité d’un deuxième tas de bois qui est la proie des flammes. Plusieurs personnes de Lescar contribuent à ces mesures de protection contre le fléau. A 20h, tout danger de nouvel incendie est écarté.

Des premiers renseignements recueillis, il résulte que ce serait les troupes d’occupation qui auraient mis le feu à cet immeuble ainsi qu’au 2 grands tas de bois. Depuis plusieurs mois ces troupes occupaient le quartier St Joseph qu’elles ont quitté ce même jour vers 13 heures.

Déclarations : « Je me nomme Perrouilh Pierre, âgé de 60 ans, doyen de Lescar. Le 20 aout 1944 à 13h. je me trouvais au presbytère lorsque j’ai vu une épaisse et noire fumée s’élever derrière l’école St Joseph j’ai pensé tout de suite qu’il pouvait s’agir de la salle de spectacle.

J’ai entendu du bruit venant de la rue. C’étaient les Allemands qui quittaient le cantonnement St Joseph ainsi que la ville de Lescar. Je me suis immédiatement rendu sur les lieux et j’ai constaté que le bâtiment à usage de salle de spectacle était la proie des flammes. Le feu ravageant ladite salle avait déjà consumé les ¾ de la toiture.

Il est indubitable que ce sont les Allemands qui ont mis le feu, car ils avaient transformé ce bâtiment en magasin d’habillement où étaient entreposés 1500 couvertures, des serviettes, torchons, des draps de lit, etc., ainsi que du matériel en métal.

J’ai également constaté que des baraquements construits par les Allemands étaient la proie des flammes.

A 14 heures on a attiré mon attention sur un commencement d’incendie dans une salle de classe.. C’était un morceau de papier qui achevait de brûler, sans avoir réussi à mettre le feu à l’immeuble. L’intention criminelle était encore là indubitable, car les tables de cette salle, transformée en atelier de cordonnerie étaient toutes recouvertes d’essence.

Déjà à 13h les baraquements construits par les Allemands sur le terrain de Mr St Martin, demeurant à Lescar, adossés au quartier St Joseph, avaient commencé à brûler.

Etant donné l’importance de l’incendie, je ne puis évaluer le montant des dommages causés. Je suis assuré contre l’incendie à la Cie d’assurances L a Foncière. Le 15 jantier 1944 au début de l’occupation par les Allemands un état des lieux a été dressé par Me Tavara huissier à Pau.

Je demande à être dédommagé du préjudice que subit la paroisse de Lescar.

           « Je me nomme Leschoulles Marie-Louise, 39 ans, ménagère  demeurant à Lescar. Depuis le mois d’avril 1943, j’étais employée comme aide-cuisinière pour le compte des troupes d’occupation. Le 20 aout 1944, à 12h30 j’étais occupée à la cuisine lorsque j’ai vu les militaires de ce cantonnement s’échapper tout en mangeant et tout en s’équipant. Je me suis intéressée à une personne de leurs services en lui demandant s’ils partaient voir les terroristes. Cette personne m’a répondu  « non, ils vont prendre les ordres ». Je suis repartie à la cuisine où j’ai vu le chef cuisinier allemand qui m’a dit de ne pas avoir peur, qu’il n’y avait pas de terroristes. A ce moment, il m’a fait comprendre que tant qu’ils seraient là il n’y avait aucun danger mais qu’en partant ils arroseraient le sol de la cuisine avec de la benzine et que ça ferait « pouf ».

J’ai alors dit au chef cuisinier de ne pas mettre de la benzine, car il mettrait le feu à tout le quartier. Après ces paroles je suis partie.

J’ajoute qu’une employée appelée Antoinette a objecté une autre réflexion en disant que les Allemands mettraient le feu au magasin d’habillement se trouvant dans la salle de spectacle et appartenant à la paroisse. Je savais que dans ce magasin étaient entreposés des matelas, des chemises, des couvertures, etc. ainsi qu’une assez grande quantité de vaisselle.

          Je me nomme Trouilh Roger, 33 ans, sans profession, demeurant chez sa mère concierge au service de Mr. Legrand.

Le 20 aout 1944 vers 13 heures, 2 Allemands m’ont appelé en disant « Faites attention à votre maison, on met le feu partout ».

Les Allemands occupaient alors un cantonnement représenté par un groupe de maisons dont les noms sont les suivants : M.M. Berderi, Legrand, l’école St Joseph et la villa « La Roseraie ».

J’ai vu ces 2 militaires allemands mettre le feu à 2 camions-radio placés dans la cour du cantonnement, à 3 baraquements dont l’un touchait mon jardin et était voisin de l’école et à deux grands tas de bois qui se trouvaient dans la propriété de Mr Legrand.

Vers 13h30 d’autres Allemands sont revenus et sont entrés dans l’école St Joseph j’ai alors entendu une forte détonation dont je n’ai pas pu déterminer la nature.

            Je me nomme Liabat Jeanne, âgée de 39 ans, née Cazenave, ménagère demeurant à Lescar. J’étais employée au cantonnement St. Joseph pour le compte des troupes d’occupation comme aide-cuisinière.

Le 20 aout 1944 dans la matinée, sans pouvoir préciser l’heure, j’ai remarqué que les militaires allemands étaient dans un état de surexcitation complète.

Par 2 jeunes filles connues sous les noms de Beignatborde Antoinette et de Larrieu Ginette, demeurant la 1ère rue du 14 juillet à Pau, la 2ème 5 rue de Foix à Pau, j’ai appris que tout le matériel existant à la cuisine de ce cantonnement sauterait.

Par la suite je suis allée voir si les bidons d’essence étaient toujours au jardin. Ces bidons ne s’y trouvaient plus. A 12h20, à 100m environ du cantonnement, j’ai vu une épaisse et noire fumée. J’ai pensé que les paroles dites par les jeunes filles en question avaient été mises à exécution.

 

A noter que ce procès verbal comporte lui aussi une anomalie de date. En en-tête, il est mentionné: 20 juin 1944!!!!

Denis Labau précise que le dimanche suivant (27 août) Lescar libérée fête sa délivrance et acclame « ses libérateurs ». Un bal public est donné place Saint-Julien qui sera rebaptisée sur l’initiative de quelques résistants: place de la Libération.

La rue Saint-Julien est dédiée aux Frères-Rieupeyrous dont le cadet Jean a été exécuté par les Allemands.

 

Références bibliographiques:

  • Poullenot (Louis), Basses-Pyrénées, Occupation, Libération, 1940-1945, J & D Editions,  Biarritz, 1995, 366 p.
  •        p. 199 : brève existence d’un maquis, en 1943, fonctionnant dans le cadre des MUR.
  •        p. 317 : nombre de maisons détruites par les représailles allemandes : 2
  • Labau (Denis), Lescar, chronique d’une cité du Béarn au XXème siècle, Marrimpouey Successeurs, Pau, 1985, 232p.
  •      p. 135: La Seconde Guerre mondiale. L’année 1939-1940. La Résistance en Béarn; L’Occupation. La Libération. Quelques dates.
  •     p. 161: Les lampions de la Libération.

Fac-similé du procès verbal de la gendarmerie: page 1 , page 2 , page 3 , page 4 .

 

 

 

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