Association  BPSGM          Les Basses Pyrénées dans la seconde guerre mondiale         64000 Pau

CANTAL Serge. Une tentative de passage tragique. Août 1943.

CANTAL Serge qui tentait de passer en Espagne en solitaire est abattu par les douaniers allemands au col des Moines le 17 août 1943.

 

 

 

 

Cantal Serge tentait de passer en Espagne le 17 août 1943 par le col des Moines. Repéré par les douaniers de faction sur ce col, il est abattu par ceux-ci.

Ce passage tragique a fait l’objet de 2 comptes rendus de gendarmerie: au niveau local par les militaires de la caserne de Laruns, au niveau départemental par le commandant de la section d’Oloron. Ces rapports de gendarmerie sont complétés par le certificat médical du médecin qui a constaté le décès.

En 1945, la mère de la victime intervient auprès du préfet des Basses-Pyrénées pour demander de lui faire parvenir les documents d’identité et les affaires personnelles de son fils.

Source: AD64 . Cote 1031W182

 

Transcription des pièces d’archive.

 

Rapport de la gendarmerie de Laruns.

Cejourd’hui, dix huit août, mil neuf cent quarante trois à cinq heures ;

Nous soussignés : Martin, Adjudant, PICHON Albert, PAULY Jacques, MOLIES Fernand, gendarmes à pied à la résidence de LARUNS, département des Basses-Pyrénées, revêtus de notre uniforme et conformément aux ordres de nos Chefs :

Le 17 août 1943, à 19 heures avons été informé par le secrétaire de M. le Sous-Préfet que l’Autorité allemande avait abattu un homme au Col des Moines, dans la nuit du 16 au 17 août 1943.

Notre Commandant de Section a été alerté téléphoniquement. M. le Maire de LARUNS a été informé et une caravane de secours a été constituée. 

Le 18 août 1943 à 5 heures, quittaient LARUNS : l’Adjudant MARTIN, les gendarmes PAULY, PICHON, l’élève gendarme MOLIES ; la caravane de secours composée de MM. CASENAVE, SANCHETTE Roger, SANCHETTE Jean, CABANE, FIGUE, MARTINET, CASASSUS, CESARD, ARRUEBO, SERAMON, Docteur BRIOL, montait dans un camion des Ponts et Chaussées où un brancard était disposé.

Au poste de douane allemand de GABAS, le Chef de Poste nous dit que deux douaniers allemands se rendent au Col des Moines, ils sont d’ailleurs rejoints et dépassés.

A 7 heures, la caravane descend de camion à BIOUS-ARTIGUES et l’ascension commence ; elle se terminera au Col des Moines à 9 heures 30.

Un poste allemand composé de 5 hommes campe sur la partie sud-est du Col, le cadavre d’un jeune apparaît. Il s’agit d’un jeune homme qui a été atteint par un projectile dans la région droite de la poitrine ; la balle est sortie à hauteur de l’épaule gauche provoquant une mort foudroyante.

Le corps repose sur le ventre, les mains sont crispées, il est vêtu d’une chemise bleue, veste bleue, pantalon gris, bas blancs, souliers bas de ville de couleur jaune, un sac de montagne est sur son dos ; en présence des douaniers allemands ont procédé à la fouille.

Il a été découvert : 1° un portefeuille en cuir marron, contenant une carte d’identité de l’intéressé, la somme de 137fr60, de deux photos d’identité.Dans le sac : un extrait de l’acte de naissance, 2° un certificat de nationalité, 3° deux diplômes de baccalauréat, 4° un brevet de pilote d’aviation maritime, 5° divers objets de toilette, 6° des vivres (pain, biscuits et viande).

Les douaniers allemands s’opposent à ce qu’aucune pièce d’identité soit prise, néanmoins il est établi que l’identité de la victime est la suivante :

CANTAL, Serge, René, Henri, étudiant, né le 24 janvier 1922, à Charenton-le Pont (Seine), demeurant 39 rue des Ecoles à Charenton-le-Pont (Seine) fils d’Alexandre, chef de comptabilité, et de MEMOIRE Esther, Yvonne.

A dix heures, la descente recommence, elle se terminera à seize heures à BIOS-ARTIGUES sous une chaleur torride.

A dix sept heures trente, LARUNS est atteint, le corps déposé à la mairie est mis en bière et inhumé, car la décomposition est avancée.

Monsieur le Maire adresse un télégramme à l’adresse indiquée sur la carte d’identité.

Quatre expéditions :

  • la 1ère à M. le Préfet des Basses-Pyrénées à PAU

  • la 2ème à M. le Sous-Préfet à OLORON

  • la 3ème à M. le Procureur de la République à PAU

  • la 4ème aux archives

Le document porte 4 signatures .

Rapport de la section de gendarmerie d’Oloron.

GENDARMERIE NATIONALE OLORON, le 19 août 1943

17° LEGION

COMPAGNIE DES

BASSES-PYRENEES

SECTION D’OLORON

N° 13/4 RAPPORT

du Capitaine VINCENT,

Commandant la Section de Gendarmerie d’Oloron,

sur une tentative de franchissement de la frontière pyrénéenne.

—————

Référence : Note N°2.706 Légion du 9/12/1942

Le 17 août 1943, les douaniers allemands du poste installé au col des Moines ont abattu, au fusil, à proximité du col, un jeune homme dont l’identité figure in-fine.

D’après les renseignements fragmentaires obtenus auprès des douaniers allemands les faits se seraient déroulés dans les conditions suivantes :

Le 17 août, vers 1heure, une patrouille de douaniers découvrait à une trentaine de mètres du poste, un homme qui se dirigeait vers la frontière en rampant.

En dépit de l’avertissement donné sous forme d’un coup tiré en l’air et des sommations immédiatement faites, l’homme avait continué sa progression. C’est donc à ce moment que le feu aurait été ouvert sur l’inconnu qui fut tué sur le coup.

Informé de ces faits, le 17 août, à 20 heures, le Cdt de Section a prescrit à l’Adjudant Cdt la B.T. de LARUNS de prendre les mesures habituelles.

En conséquence, une caravane commandée par l’Adjudant MARTIN, quatre militaires de la Brigade, le Docteur BRIOL et le personnel civil qualifié de LARUNS, s’est rendue le 18 août, dans la matinée, au col des Moines où le corps a été remis par les douaniers allemands.

Ces derniers ont conservé toutes les pièces trouvées sur le cadavre, mais ont , toutefois, consenti à donner l’identité.

Ainsi que le mentionne le certificat médical établi par le Docteur BRIOL, la mort a été instantanée «  la balle dont l’orifice d’entrée se trouve dans la région intercostale droite et l’orifice de sortie au niveau de l’épaule gauche ayant atteint l’aorte ascendante, les oreilles et les vaisseaux de la base du cœur »

Dès le retour de la caravane, à LARUNS, le corps en raison de son état à été mis en bière et immédiatement inhumé dans le cimetière de la localité.

La mairie de LARUNS a adressé un télégramme à la famille du défunt.

IDENTITE :

«  CANTAL (Serge, René, Henri,), étudiant, né le 24 janvier 1922 à CHARETON-LE-PONT (Seine), demeurant 39 rue des Ecoles à CHARETON-LE-PONT (Seine), fils d’Alexandre chef de comptabilité et de MEMOIRE Esther, Yvonne »

Destinataires :

– M. le Préfet régional à TOULOUSE ;

  • M. le Préfet départemental à PAU ;

  • M. le sous-préfet à OLORON ;

  • M. le Colonel Cdt la 17ème légion de Gendarmerie à TOULOUSE ;

  • M. le Chef d’escadron Cie des B.P. À PAU.

Mention en bas de deuxième page :

N° 265/39.- Transmis par le Chef d’Escadron DAVERGNE Cdt la Compagnie des Basses-Pyrénées à M. le Préfet des Basses-Pyrénées à PAU à titre d’information.

Pau, le 20 août 1943

Signature et cachet de la compagnie de gendarmerie.

La note porte le cachet en rouge : SECRET.

 

Certificat médical délivré par le Docteur Briol.

 

COPIE DU CERTIFICAT MEDICAL.

LARUNS LE 18 AOUT 1943

Je soussigné, Docteur en médecine BRIOL, Auguste, Pierre, domicilié à Laruns, en vertu de la réquisition de l’adjudant de gendarmerie de Laruns, certifie avoir examiné le cadavre du nommé CANTAL, Serge, trouvé au col des Moines.

Celui-ci était à trente mètres environ du sommet couché sur le dos .

L’examen a montré la présence de deux orifices de six millimètres environ de diamètre situés l’un au niveau de l’extrémité de l’épaule gauche, l’autre au niveau de l’espace intercostal C5-C6 ligne axillaire coté droit.

L’examen des vêtements a permis de conclure à des blessures correspondant au point d’impact et au point de sortie d’un projectile (genre balle de fusil ou probablement de mitraillette).

L’orifice d’entrée se trouvant dans la région intercostale, l’orifice de sortie au niveau de l’épaule.

Les lésions anatomiques probables sont : blessure de l’aorte ascendante, des oreillettes et des vaisseaux de la base du cœur.

La mort a été foudroyante.

Signé : Docteur Briol.

Requête de la mère de la victime et réponse du Préfet des Basses-Pyrénées. 

Lettre de la famille Cantal au Préfet des Basses-Pyrénées. Juillet 1945.

 

Le 19 août 1943, j’ai été avisé par télégramme, par M. le Maire de Laruns que mon fils Serge Cantal né le 24 janvier 1942 (sic) avait été tué par une patrouille allemande au Col des Moines le 17 août et inhumé à Laruns, par la suite le Docteur Briol de Laruns m’a fait connaître que les papiers personnels trouvés sur mon fils avaient ét déposés à la préfecture des Basses-Pyrénées.

Je vous serais très reconnaissante, M. le Préfet, si ces papiers se trouvent à la préfecture de bien vouloir me les faire parvenir au plus tôt

 

Réponse du préfet.

 

Madame

En réponse à votre lettre du 2 juillet, j’ai l’honneur de faire connaître qu’il ressort du rapport établi par la Gendarmerie d’Oloron à la suite de la mort de votre fils, tué au Col des Moines par des douaniers allemands le 17 août 1943, que tous les papiers d’identité ont été conservés par ces derniers.

Il m’est tout au plus possible de vous donner la nomenclature des objets et pièces dont il a été trouvé porteur :

1- un portefeuille eu cuir marron, contenant les pièces d’identité de l’intéressé, la somme de 137fr60, deux photos d’identité.

2- un extrait de l’acte de naissance.

3- un certificat de nationalité.

4- deux diplômes de baccalauréat.

5- un brevet de pilote d’aviation maritime.

6- divers objets de toilette

7- des vivres (pain, biscuits, viande).

Veuillez agréer, l’expression de mes sentiments distingués.

Le Préfet

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Serge CANTAL est reconnu comme victime civile. Dossier SHD Caen  AC 21 P 321643

Il est homologué « déportés et internés de la Résistance ». Dossier SHD Vincennes GR 16 P 104500.

Serge CANTAL figure au répertoire « Maitron des fusillés » . Pour accéder à sa fiche: cliquer ici.

Serge CANTAL figure sur les plaques commémoratives de la mairie de Charenton-le-Pont.

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